Des camps d’extermination
Avez-vous déjà mis les pieds dans un abattoir ? La plupart d’entre vous répondront certainement non car l’idée même de se retrouver ne serait-ce que devant la grille d’entrée nous fait froid dans le dos. C’est comme si une alarme intérieure se déclenchait pour nous avertir d’un danger. Les abattoirs, des lieux chargés d’ondes malsaines. Des lieux où la violence et la cruauté sont maîtres à bord. Des lieux où l’Homme s’est transformé en monstre. Des lieux de non-droit, de bassesse, de honte. Et puis quand on y réfléchit de façon rationnelle, voilà comment nous pourrions les décrire. Il s’agit d’un processus d’extermination, méticuleusement planifié, partiellement mécanisé, rythmé de plusieurs séquences correspondant aux différentes étapes de la mise à mort, dans une cadence adaptée au rendement escompté. Une vague odeur de déjà vu. La seule différence : la nature des victimes.

Ces victimes qui ne peuvent s’exprimer autrement que par des hurlements et des tremblements. Nous parlons des animaux qui ressentent chaque jour cette peur que bon nombre d’entre nous ne ressentirons jamais. La peur de la menace de mort. Ce spectacle de l’horreur n’est que la preuve de notre lâcheté et de notre folie. Lâcheté parce que nous n’aurions pas le cran de faire le sale boulot nous-même à mains nues. Et folie parce que nous utilisons notre intelligence pour ces projets insufflés par notre insatiable boulimie d’argent. Le nerf de la guerre se situe bien dans ce mot. Tout tourne autour de ça. L’argent rend fou au point de perdre sa moralité et son empathie. Au point d’oublier son humanité. Mais que fait-on du droit de vivre ?
La dissonance cognitive: un conflit intérieur

Si l’on demande à une personne omnivore si elle est d’accord avec la cruauté qui se déroule dans les abattoirs, la réponse sera très probablement non. Elle ajoutera même qu’elle ne comprend pas cette violence gratuite et que ces actes sont honteux et ignobles. Cette empathie envers les animaux est universelle (à quelques exceptions près). Cependant, une chose bien curieuse se passe: la personne ne va pas changer ces habitudes alimentaires pour autant et continuera même à acheter le résultat de ce qu’elle appelle « ignominie ».
Comment peut-on expliquer alors cette contradiction absurde et pourtant vraie et partagée par des millions de consommateurs de viandes? Est-ce dû à un oubli soudain? Est-ce que ces gens seraient mauvais au point d’être capables de commettre ces actes sans aucun scrupule ? Rien de tout cela. En psychologie, on parle du phénomène de dissonance cognitive. Ici, le fait d’acheter un produit que je ne cautionne pas crée une rupture entre ce que je dis et ce que je fais c’est à dire entre mes pensées et mes actes. Pour atténuer cette dissonance culpabilisante, le cerveau a trouvé une parade : il justifie nos actes par toutes sortes d’arguments. Dans notre exemple, une personne qui aimerait sincèrement les animaux et qui, malgré tout, continuerait de les manger, dirait certainement les phrases suivantes : « ils ne doivent pas vraiment souffrir » ou « on a toujours mangé de la viande » ou encore « l’être humain est de toute façon le prédateur des ces animaux, c’est dans l’ordre des choses ». En somme, le cerveau nous souffle des excuses pour nous dépecer du sentiment de responsabilité. Voilà ce qui explique pourquoi certaines personnes sont en parfaite contradiction avec leur moi profond et deviennent complices d’un système qu’elles trouvent abjecte.
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